Pourquoi la nature a-t-elle donné à l’Homme les moyens de courir longtemps ?

Aux Jeux Olympiques du Vivant, l’Homme, ou Homo Sapiens (notre nom latin) ne gagnerait pas beaucoup de médailles.
Il n’est pas le plus rapide.
Il n’est pas le plus fort.
Il n’est pas celui qui saute le plus haut, ni le plus loin.
Mais la nature l’a récompensé d’une seule médaille d’or : celle de l’endurance. Sur une course très longue, comme un marathon (42 kilomètres), l’être humain bat tous ses concurrents directs, comme les chiens, les loups et les chevaux. Incroyable, non ?
Mais alors pourquoi et comment l’Homme est devenu un singe capable de courir longtemps ?

Pourquoi Homo Sapiens est devenu un coureur aussi endurant ?
La nature nous a « fabriqué » un corps adapté aux courses de longues distances à petite vitesse. Cela a pris des millions d’années, et ces capacités ont permis à nos ancêtres de survivre dans un environnement bien plus hostile qu’aujourd’hui.
Le début de la marche sur 2 jambes (ou de la bipédie)
Au tout début de notre histoire, nos ancêtres étaient des singes. Ils vivaient au cœur d’une immense forêt, où la nourriture était riche et facile d’accès. Comme les chimpanzés, ils marchaient à quatre pattes et grimpaient aux arbres. Cela les protégeait des prédateurs qui restaient au sol.
À la suite de grosses périodes de sécheresse, les forêts ont été remplacées par la savane. Beaucoup de singes ont disparu, mais certains ont survécu en s’adaptant. Comment ? En apprenant à marcher sur 2 pattes.
Cette façon de marcher s’appelle la bipédie, et elle a changé leur corps :
- les épaules sont devenus plus étroites ;
- les bras sont devenus plus courts et les jambes plus longues ;
- les orteils sont devenus parallèles (contrairement à nos mains, dont le pouce n’est pas dans la même direction).
Ces changements, obtenus grâce à la sélection naturelle, ont permis à nos ancêtres de marcher et de courir lentement sans trop se fatiguer. Ils étaient alors capables de parcourir de grandes distances chaque jour pour se nourrir. C’est comme ça qu’ils sont devenus les célèbres chasseurs-cueilleurs que l’on connaît aujourd’hui.

Si tu veux en savoir plus sur l’évolution des espèces, tu peux aussi lire cet article qui t’explique ce qu’est la sélection naturelle.
La chasse à l’épuisement, la course après la nourriture
Bien avant l’apparition et le développement des outils, nos ancêtres ont dû trouver des solutions pour chasser des animaux. Malheureusement pour eux, c’étaient de mauvais sprinteurs, et n’importe quelle gazelle ou gnou les distançait en quelques foulées à peine.
Alors, au lieu de tenter de les battre à la course de vitesse, ils poursuivaient leurs proies jusqu’à ce qu’elles soient trop fatiguées pour continuer. Cela est possible grâce à l’un de nos supers pouvoirs : la transpiration.
Quand on fait un effort, notre peau, dépourvue de poils, transpire. Cela permet à notre corps de se refroidir. On peut alors courir de longues heures au soleil sans risquer de surchauffer.
Mais ce n’est pas le cas des animaux. Pour abaisser la température de leur corps, ils doivent respirer bruyamment et sortir la langue de la bouche. On dit qu’ils halètent.
C’est pour ça que les chiens respirent fort quand tu joues avec eux. On peut dire qu’ils transpirent de la langue (ou alors que notre corps entier est une grande langue…, mais je préfère la première image).
Le problème, c’est que pour haleter, un animal doit s’arrêter de courir. Quand ils courent longtemps, leurs organes tapent dans leur diaphragme, ce qui les empêche de respirer correctement. S’ils ne peuvent pas se refroidir, ils finissent par être épuisés.
C’est là que nos ancêtres entraient en action : une fois l’animal trop fatigué, ils pouvaient le capturer plus facilement. C’est malin, non ?

Aujourd’hui, on n’a plus besoin de courir des heures pour nous nourrir. Il nous suffit d’aller prendre quelques biscuits dans le placard et le tour est joué. Mais notre corps est toujours programmé pour la course à pied grâce à des supers caractéristiques qui font de chacun de nous des athlètes endurants. Mais quelles sont-elles ?
L’Homme, une machine faite pour courir
Des pieds adaptés à la course à pied
Les pieds, tu trouves ça pas très beaux et parfois, ça sent mauvais. On dit même des choses pas très gentilles sur eux : être bête comme ses pieds, réaliser une action comme un pied, … Et pourtant, ils sont d’incroyables outils, pour lesquels Mère Nature a travaillé d’arrache-PIED.
Ils ont été imaginés comme des ressorts, te permettant de rebondir à chaque pas et d’économiser ton énergie.
Tu as sûrement remarqué que ton pied présentait une arche (il n’est pas plat). Cette arche s’appelle “voûte plantaire”. À chaque foulée, quand ton pied touche le sol, la voûte s’aplatit. Puis, elle revient à sa forme initiale, délivrant de l’énergie et te permettant d’aller plus vite sans utiliser tes muscles.
Mais le meilleur allié de la course est le tendon d’Achille. Si tu touches l’arrière de ton pied, au-dessus du talon, tu peux le sentir, il s’agit d’une sorte de gros tuyau. Tout comme la voûte plantaire, le tendon se contracte et se relâche à chaque foulée. Il se comporte comme un gros ressort qui te propulse vers l’avant.
Enfin, tu remarques que tes orteils sont tout petits. Avant, nos ancêtres vivaient dans les arbres, et leurs pieds étaient comme des mains : de longs doigts et un pouce dit « opposable », c’est-à-dire qui bouge dans l’autre sens.
Cela leur permettait d’attraper les branches aussi bien avec leurs mains qu’avec leurs pieds. Mais quand ils ont commencé à marcher debout, leurs orteils se sont alignés, et sont devenus plus courts. Grâce à ça, on évite de se casser les orteils à chaque pas !
Tu vois, avec des pieds comme les tiens, tu es vraiment fait pour bouger !
Des fesses rebondies pour mieux courir
Les fesses humaines présentent une originalité : elles sont rebondies et bien rondes. Cette forme provient du muscle qui les composent : le grand fessier. C’est le muscle le plus puissant et le plus gros du corps humain.
Ce muscle imposant est situé entre ton buste et tes jambes. Il constitue une sorte de pont pour maintenir ces deux parties de ton corps ensemble.
Quand tu marches, il n’est pas très actif car tu te déplaces lentement. En revanche, quand tu commences à courir, ton buste s’incline légèrement vers l’avant. Le grand fessier devient super important, car il t’aide à te stabiliser pour ne pas tomber quand tu accélères.
Une tête stable pour courir facilement
Avoir des pieds qui rebondissent et un buste stable, c’est bien. Mais imagine si à chaque pas, tu devais penser à relever la tête. Ça serait difficile, non ? Heureusement, la nature n’a pas fait les choses à moitié. Elle a donné à Homo Sapiens un nouvel équipement, invisible mais indispensable : le ligament nucal.
Le ligament nucal est une large bande située dans ta nuque. Elle est absente chez les singes, car ils ne courent pas dans les arbres. Sa mission ? Maintenir et stabiliser ta tête pendant que tu cours, pour que tu n’aies pas à y penser à chaque foulée.

Des articulations qui absorbent les chocs pendant la course
La course à pied est un sport dit à impact, contrairement au vélo ou à la natation. En effet, à chaque foulée, ton pied cogne le sol et ton corps est soumis à presque 3 fois ton poids. C’est beaucoup ! Mais ce n’est pas un problème car tu as ce qu’il faut pour te protéger des ces impacts à répétition.
L’absorption des chocs est justement un des rôles de nos articulations : genoux, vertèbres, hanches, chevilles… Ces articulations contiennent un liquide nommé le liquide synovial. Un peu gluant, il agit comme un coussin fluide. À chaque pas, il aide à absorber une partie du choc pour protéger tes os et tes muscles.
Au fil du temps, nos articulations se sont légèrement élargies. Elles sont plus grandes que celles de nos ancêtres ou des singes actuels. Cela rend alors la course plus agréable.
Tu n’as jamais remarqué que tu avais, toi aussi, ces supers pouvoirs, car tout cela se passe sans que tu y fasses attention.
Pour survivre dans un environnement difficile, comme celui de nos ancêtres, il fallait qu’ils soient en pleine forme. Heureusement, la nature est bien faite : si l’Homme doit courir pour se nourrir, alors il faut que la course lui fasse du bien.
Les supers pouvoirs du running
Dans ton entourage, il y a de grande chance qu’un ou plusieurs de tes proches pratiquent la course à pied. Tu aimes peut-être également faire la course avec tes copines et copains !
Voilà pourquoi courir, c’est génial, et bon pour toi !
Courir te rend plus fort !
Ton corps est bien fait : il change et s’adapte à ce que tu lui demandes, mais il faut y aller doucement et petit à petit. Alors pas besoin de pouvoirs magiques pour devenir un super héros !
Quand tu cours, tes muscles travaillent dur. Plus tu cours, plus ils se renforcent et plus tu deviens fort, rapide et endurant.
Ton cœur est aussi un muscle. Comme tous les autres, il va devenir meilleur et te donner beaucoup d’énergie pour faire plein d’autres activités.
Mais ce n’est pas tout : tes poumons vont respirer plus fort, tes os vont devenir plus solides et ton cerveau réfléchira plus vite !
Alors, prêt pour devenir un super héros ?
Courir te rend plus heureux
Comme tu l’as compris, Mère Nature a pensé à tout, et même à ce qu’il se passe dans notre tête. À la fin de chaque séance de sport, ton cerveau produit des molécules, appelées endorphines. Résultat : tu te sens joyeux et fier de toi après avoir couru.
Le cerveau produit des endorphines pour que tu aies envie de recommencer une nouvelle fois. Et oui, parce que si nos ancêtres n’avaient plus eu l’envie de courir, il serait mort de faim !

Alors, prêt à enfiler tes baskets ?
Courir c’est avant tout un moment pour s’amuser ! Il existe de nombreux jeux :
- Faire la course avec un copain ou une copine, comme si vous étiez des lions ;
- Essayer de sauter au-dessus des flaques ou des cailloux, comme si c’étaient des pièges ;
- Partir à l’aventure dans un parc et explorer tous les recoins ;
- Inventer des règles un peu folles : zigzaguer, courir en arrière ou dépasser quelqu’un en faisant des bruits rigolos.
À toi de jouer champion ! Essaye de courir en t’amusant, et tu verras, tu ne voudras plus t’arrêter !
Si tu aimes bouger, laisse-nous en commentaire ton jeu ou ton sport préféré !
Source : article de Daniel E. Liberman : endurance running and the evolution of Homo
14 réponses
Merci pour cet article très instructif et passionnant. Je ne connaissais pas cette spécificité humaine. Il est le champion du monde d’endurance. Mais je suis impressionné par les performances des athlètes qui peuvent faire des courses en pleine nature de plusieures centaines de kilomètres. 🥵
Ah oui! Je suis totalement d’accord! Ces athlètes semblent être des surhumains!
J’ai beaucoup aimé la façon dont tu expliques l’évolution de l’Homme et son incroyable endurance. C’est inspirant de voir comment notre histoire ancestrale façonne encore aujourd’hui notre capacité à courir.
Merci pour cette perspective intéressante 🙂
Oui, l’évolution naturelle est toujours inscrite en nous aujourd’hui…même si peu de personne mettent en pratique cette capacité à courrir!
Merci pour cet article très instructif ! Par contre, pour ce qui est de pratiquer la course à pieds… je vais encore attendre un peu et me contenter d’aller chercher ma viande au supermarché ! 🙂
Oui! l’évolution nous a doté de capacité de sportif mais il faut bien reconnaitre qu’aller chercher sa viande au supermarché c’est quand même vachement plus simple!
Je ne savais pas que l’être humain était le champion de l’endurance et j’en reste bouche bée. Cet article m’aura appris quelque chose et j’en suis infiniment reconnaissant à son auteur !
C’est vrai qu’on n’a pas l’impression que l’être humain puisse être champion de quelque chose dans la nature…et pourtant!
Tu abordes le sujet de manière scientifique, ce qui rend la conférence aussi instructive qu’agréable. J’ai adoré découvrir les arguments liés à l’évolution et les implications pour notre mode de vie actuel. Ça donne envie de chausser et de voir la course sous un autre angle.
Se rappeler nos lointaines origines…c’est super intéressant!
Héhéhé oui, mais moi je rpéfère marcher 😉 Mais clairement, normalement on est aussi fait pour courir longtemps effectivement. Normalement…
Oui, on est d’accord…ça fait longtemps que l’on ne court plus après notre repas!
Article passionnant et à l’écriture pédagogique. Merci ! 🙂
Avec plaisir!